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mercredi 31 août 2011

Luc Chatel veut le retour de la morale à l'école : et pourquoi pas ?


Une première remarque : la lecture des commentaires de cet article, ou de celui-ci surLe Post, par exemple, montre que les internautes, lorsque Luc Chatel parle de morale à l'école, pensent immédiatement à la morale - ou l'absence de morale - des hommes politiques. Or, comme le dénonçait Peter Osborne, éditorialiste de droite anglais, ce sont (en Angleterre comme en France) les élites qui, en perdant le sens moral et en affichant les valeurs de la réussite la plus vulgaire et le goût de l'argent et des signes extérieurs et bling bling de richesses, ont sérieusement dégradé le niveau moral de la société. Dans ce contexte, qu'un représentant de cette élite bling bling parle de morale paraît en effet ridicule ; et comme un poisson pourrit par la tête, enseigner la morale à l'école peut sembler vain.
Oui, mais... en classe, on gère des groupes d'élèves. On constate aisément qu'au sein de ses groupes, les valeurs morales du travail et d'efforts peinent à s'imposer : oh, ce n'est pas qu'elles n'existent pas, loin s'en faut ! Il n'y a pas plus conformiste et bravounet qu'une classe. La plupart des enfants savent ce qu'est le courage, le dévouement, l'amitié, la sincérité, et, très jeunes, ils sont nombreux à s'imaginer encore qu'il vaut mieux être dévoué et sincère, dans leur immense naïveté enfantine.
Sauf qu'au fils des ans, certains petits élèves gentils et sérieux, au sein des groupes classe, constamment confrontés à des élèves qui pourfendent et se moquent de ces valeurs, se rendent bien compte que le rôle du gentil sérieux est le rôle de l'imbécile ; ils referment en eux-mêmes tout ce qu'il peut y avoir de noble, d'altruiste et de moral ; ils constatent aisément que celui qui ose, qui prend sans demander, qui se moque des règles, l'individualiste égoïste, le consommateur décomplexé, est le véritable héros. Cela culmine au collège où certains élèves s'empêchent d'être de trop bons élèves pour ne pas être moqué par les autres comme un "intello" ou un "fils ou fille à sa maman" qui, bêtement, croit en la valeur de l'école...
Alors si des cours de morale pouvaient remettre les pendules à l'heure au sein des classes. Si les élèves qui font des efforts, non pas pour travailler plus et gagner plus, mais pour acquérir, dans leur propre intérêt, des connaissances et des savoirs, pouvaient être respectés et se respecter eux-mêmes. A l'inverse, si les élèves en difficulté pouvaient être respectés en tant que ce qu'ils sont : des élèves qui ont des difficultés et font des efforts, sans qu'il y ait lieu de les juger et déconsidérer.
Le vrai/le faux, le respect des règles, le courage, la franchise, le droit à l’intimité, a dit Luc Chatel dans son interview… Et pourquoi pas ? Tout cela peut parfaitement s'illustrer au sein d'une classe, par des exemples concrets pris dans la vie de tous les jours des enfants, soit dans leur vie de famille, soit dans leur vie scolaire.Tout cela peut aussi aider les instituteurs à remettre à l'heure nombre de pendules qui se sont déréglées dans l'esprit des enfants parce qu'elles sont déréglées dans la vie des adultes.
Evidemment, si l'on veut faire semblant de penser qu'il s'agit de réintroduire les prières ou le lever du drapeau, on peut se gausser de cette idée. Mais, en soi, je ne crois pas que ce soit une mauvaise chose, et que cela peut même peut-être aider les instituteurs à réaffirmer certaines valeurs morales, universelles et civiques sur lesquels il n'y a pas de honte à se mettre d'accord, pour vivre ensemble, dans le cadre d'une société républicaine et laïque.

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