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lundi 20 juin 2011

A quoi joue Villepin ?


A quoi joue Villepin ?
La musique est cassée, mais il danse toujours. Ses partisans se raréfient, sa popularité s'effondre, ses soutiens sont aux abonnés absents... On ne voudrait pas le décevoir, mais tout de même.
Pas facile pour Dominique de Villepin. L'année dernière, ça semblait bien parti, mais on sent bien qu'il patine et que la mécanique n'entraine plus. Dans le dernier sondage Ifop pour le JDD, le 12 juin, les chiffres sont sans appel : 3 % d'intention de vote. Aie.  Le centre n'est pas assez grand pour contenir toutes les ambitions.
Mais comment s'avouer vaincu ? La stratégie de Dominique de Villepin semble être de mépriser l'évidence. Ce dimanche, il a tenu un meeting à  la Maison de l'Amérique latine, par un temps froid et menaçant. 300 personnes sont venues écouter l'homme qui en réunissait 6000 l'année dernière, lors du lancement de République Solidaire.
Il se fait attendre pendant une heure, alors qu'il fait froid et que la pluie menace.
Et tandis que les cadres du mouvement venus l'écouter patientent, transis, les organisateurs tentent de réchauffer l'atmosphère en lançant un clip de campagne : hélas, quand ça veut pas, ça veut pas : le clip bugue et rien n'apparaît sur les six écrans. Qu'importe, la voix de Dominique de Villepin se fait entendre par les hauts parleurs :"En France, il règne un sentiment de solitude et de perte du lien social. Il est urgent de redonner à chaque citoyen son droit à la dignité...". L'heure est grave.
Et puis Villepin arrive, sous des applaudissements mesurés. Souriant, le regard fixé sur l'horizon de ses ambitions, Villepin semble dans un autre monde, notent les journalistes, loin de toute préoccupation politicienne. Et il entame, sans notes, un discours passionné.
(Source : Public Senat)
L'argumentaire est plutôt basique :
Il évoque le pays et les citoyens "malmenés", les politiques "exsangues", et, face à ce triste constat, grandiloquent, il fait appelle aux forces vives de la Nation (ou tout comme)  : "Nous sommes dans un temps aussi grave qu'en 44 et en 58. Le sursaut français, c'est maintenant ! Nous avons besoin de cet esprit de résistance qui a animé la France quand l'État français n'était plus au rendez-vous !(...) Nous voulons la refondation politique, économique, sociale, culturelle et internationale, parce que nous sommes dans un temps aussi grave que 1944 et 1958. Si nous ratons cette occasion de 2012, alors c'est peut-être un long tunnel pour de longues décennies qui nous attend". Ambiance.
Puis, plus guilleret : "Cette campagne, moi aussi, je la sens bien". Une optimiste paraphrase de Nicolas Sarkozy après les grandes orgues du désespoir existentiel.
En gros, après avoir dramatisé avec lyrisme, Villepin rassure : il est là. Certes, vu ses ennuis judiciaires, il n'a pas évoqué son éventuelle candidature, mais à défaut, il a un programme.
Un procureur général de la Nation, pour "une France citoyenne, juste, indépendante", le "revenu citoyen" de 850 euros mensuels : "Plus personne dans notre pays en dessous du seuil de pauvreté, c'est une révolution" ; une gouvernance resserrée, « 10 ministres au lieu de 30 » ; la création d'un conseil territorial qui réunirait les présidents des « huit régions métropolitaines », et, ça ne mange pas de pain et ça étoffe un peu, la fin du cumul des mandats.
Et n'oublions pas "un mariage ouvert à tous", y compris "aux couples du même sexe". Et la dépénalisation du cannabis (il s'est prononcé là dessus jeudi).
Bon. Qu'en penser ? Peut-être vaut-il mieux garder un silence pudique ? Jusqu'où ira-t-il ? Est-il cohérent ? A force d'être détaché, n'a-t-il pas déconnecté de la réalité ? Ce bric à brac de colporteur peut-il séduire ?
On sent ses troupes écartelées entre la fidélité et le fatalisme... Les soutiens s'étiolent, le coeur n'y est plus. Les fidèles développent des argumentaires touchants d'aveuglement : pas de soutiens ? "Il s'en fout. C'est l'homme sans parti, sans étiquette. Il veut ressembler à de Gaulle". Des critiques ?  "La meilleure réponse aux attaques c'est le sourire ! " Pas de députés pour soutenir Villepin ? "Les députés n'agissent en général que par intérêt, leur soutien n'est pas nécessaire dans le cadre d'une campagne présidentielle". CQFD.
Et puis, Chirac le boude. Certes, la semaine dernière, dans sa boutade corrézienne, Chirac révélait à une France stupéfaite qu'il ne songeait pas à voter Sarkozy. Qu'il préférait, la bonne blague ! François Hollande. Qu'il aurait volontiers voté Juppé. Ce qu'on a ri ! Tant tout cela est cocasse. Mais Villepin a-t-il pouffé, comme nous tous, de se voir à ce point éliminé du débat par l'ex-Président dont il fut le Premier Ministre ?
Ça sent la fin de partie, tout de même.

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